Part # 2
De vous à moi, je ne sais comment je qualifierais ce deuxième séjour en neurologie.
Cela commença par une altercation pour le moins vive avec l’ambulancière, me soufflant une place qui me revenait de droit. Elle jacassa, non sans aplomb, que puisque c'était la seule place disponible, je n'avais qu’à faire autrement.
Pauvre femme, pensais-je, en n'omettant pas de paraphraser Brigitte Fontaine et son célèbre : La vérole dans ta gueule !
Comme un contre-pied, de manière très gentille, je fus accueilli de façon axiomatique par l'équipe médicale qui m'installa dans ma suite. Court préambule avant la félonie qui allait bientôt m'engloutir dans un sentiment de désarroi.
En effet, armée d'un solide sourire, l'interne en neurologie me signifia sentencieusement qu'elle se refusait à faire poser ma première perfusion ce jour, car ma biochimie du sang ne l'était pas.
J'eus beau arguer du fait que le mois dernier, cela n'avait eu aucune incidence calendaire, elle y opposa un argumentaire médical abscons qui, sans équivoque, me condamnait à une nuit d'hôpital supplémentaire.
Elle trouva bon de justifier ce manque d’empathie. Seul le médecin décide des protocoles à suivre.
Il eut été illusoire de croire que pousser des cris d'orfraie aient eu quelques effets dissuasifs. Je restai donc interdit quelques minutes, presque atone !
La douce voix chaleureuse de ma belle me sortit de cette torpeur et me poussa à l'action, enfin ! Le programme savamment préparé pour m'occuper allait pouvoir prendre corps. J'y mis trois conditions, auxquelles je m’interdisais de déroger :
- Pas de télé.
- Pas de réseaux sociaux.
- Pas d'infos.
Lecture, cinéma, musique et photographie seraient mes seules occupations ! Loin d’être un sacerdoce, bien au contraire, une sorte de mise au vert souhaitée, si je puis dire. S'affranchir simplement du poids considérable et du pouvoir écrasant que les médias de masses exercent sur nous, même si je suis très loin d'y être assujetti (enfin je me plais à y croire), me parut vital !
Mes quartiers complètement investis, je me connectai au réseau Wireless Fidelity de l'hôpital pour accéder à ma musique, qui est maintenant entièrement dématérialisée dans le nuage et au World Wide Wed. Il apparût que le protocole de communication sans fil fût satisfaisant, en deux mots fluide et non parcellaire.
L'épisode de reprise de la saison 6 The Walking Dead, particulièrement sanglant, eut un effet curatif certain sur mes nerfs. Aurais-je du m'en inquiéter et y déceler une forme de pathologie sous-jacente ?
Loin de ces considérations, je me lançai, après mon repas, dans la lecture du roman d'anticipation " Le Meilleur des Mondes " d'Aldous Huxley, qui ferait passer l'état policier Orwellien ( si on force un peu le trait ) comme ataraxique...
" Les plus grands triomphes, en matière de propagande, ont été accomplis, non pas en faisant quelque chose, mais en s'abstenant de faire. Grande est la vérité, mais plus grand encore, du point de vue pratique, est le silence au sujet de la vérité."
Certainement un des meilleurs livres que j'ai lu depuis longtemps. Je décidai d'étaler sa lecture sur cinq jours pour donner une certaine substance à mes longues journées.
Coté cinéma, j'avais pris soin de télécharger " The Revenant " d'Alejandro González Iñárritu (Amours chiennes, 21 grammes, Babel, Biutiful et Birman). Le dernier opus du mexicain ne manqua pas de me séduire et confirma (si besoin) le talent du réalisateur.
Comme pris de polyphagie cinématographique, je trouvai bon de visionner Usual Suspects, Zeitgeist : Moving Forward, le mythique Breakfast Club, et La Rage au ventre.
Bashung, Détroit, Dead Can Dance, Archive (toujours), et une partie de la team Ultimae m'accompagnèrent musicalement nuits et jours, dans une grande félicité, non loin d'un nirvana sonore qui m'est indispensable.
Photographiquement parlant, ce fut un peu plus difficile que le mois dernier. Contraint pour mes perfs par des horaires en dents de scies, des cathéters récalcitrants et des séances de kiné (très sympa mais pas planifiées), l'exercice demeura aléatoire.
Je réussi néanmoins à prendre quelques clichés, dont je vous présente ici une sélection.
Je réussi néanmoins à prendre quelques clichés, dont je vous présente ici une sélection.