" ... Autrefois, j'aurais eu besoin d'encouragement en toutes cir- constances. Car j'étais déjà écrasé par la simple existence de ton corps.
Il me souvient, par exemple, que nous nous déshabillions souvent ensemble dans une cabine. Moi, maigre, chétif, étroit ; toi, fort grand, large. Déjà dans la cabine je me trouvais lamen- table, et non seulement en face de toi, mais en face du monde entier, car tu étais pour moi la mesure de toutes choses. Mais quand nous sortions de la cabine et nous trouvions devant les gens, moi te tenant la main, petite carcasse pieds nus vacillant sur les planches, ayant peur de l'eau, incapable de répéter les mouvements de natation que, dans une bonne intention, certes, mais à ma grande honte, tu ne cessais littéralement pas de me montrer, j'étais très désespéré et, à de tels moments, mes tristes expériences dans tous les domaines s'accordaient de façon grandiose. Là où j'étais encore le plus à l'aise, c'est quand il t'ar- rivait de te déshabiller le premier et que je pouvais rester seul dans la cabine pour retarder la honte de mon apparition publi- que, jusqu'au moment où tu venais voir ce que je devenais et où tu me poussais dehors. Je t'étais reconnaissant de ce que tu ne semblais pas remarquer ma détresse, et, d'autre part, j'étais fier du corps de mon père. Il subsiste d'ailleurs aujourd'hui encore une différence de ce genre entre nous."
Lundi après midi j'ai lu cette longue lettre de Kafka à son père qu'il n'a jamais envoyé. Elle sonne comme un long réquisitoire implacable et acide contre son père castrateur et tyrannique.
C'est pas très gaie, mais cet exercice de style façon kafka est remarquablement bien écrit.
Vous pouvez lire le texte dans sa globalité ( format PDF ) par ici.
Pour illustrer votre citation, une "image" où l'on voit le terrible Hermann, le père de Kafka, surveillant son fils jusque dans le cabinet de Sigmund.
RépondreSupprimerIci:
http://www.gerard-bertrand.net/KAFKA__freud.html
Très évocatrice en effet !
RépondreSupprimerMerci du partage. Votre site est très riche, je vais le parcourir avec attention.
Bien à vous.
Je l'ai lu il y a très longtemps ; c'est effectivement un très beau texte
RépondreSupprimerlov u ever, bro
Je pense que tu te doutes bien pourquoi le titre m'a accroché...
RépondreSupprimerBisous Bro.
ouais je me doute... je t'aime
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